RUBEN ÖSTLUND POUR LA SECONDE FOIS PALME D’OR
Cette 75è édition du Festival de Cannes restera, si pas dans les annales du Festival, au moins dans l’histoire du cinéma belge. Avec trois films en compétition, la Belgique fait carton plein, frôlant même la Palme d’or pour Lukas Dhont avec « Close ». Thibaut Demeyer & Brigitte Demeyer-Lepage.
Ce qui fonctionne le mieux à Cannes, surtout peu avant le palmarès, ce sont les rumeurs. Avec un peu de bouteille, on se rend vite compte qu’il ne faut pas en tenir compte et surtout ne pas trop se réjouir. Cette année, même s’il s’agit d’une année anniversaire, les habitudes n’ont pas changé. Dès que l’on franchissait les portes du Palais, le vent des rumeurs venait nous souffler dans le cou, laissant sous-entendre que la Belgique allait frapper un grand coup. Un grand coup ? Est-ce que cela signifie que les frères Dardenne décrocheraient leur troisième palme d’or, ce qui serait historique dans l’histoire du festival ? Est-ce que Lukas Dhont serait l’heureux élu, entrant dès lors dans l’histoire du festival car il serait le seul réalisateur à avoir décroché la Caméra d’or et quatre ans plus tard la Palme d’or ? Tout est permis à Cannes, rien n’est impossible.
Déçu mais pas de trop….
Le verdict est tombé. La Belgique aura frôlé la Palme d’or mais ne l’emportera pas au plat pays qui est le nôtre. Lukas Dhont, plébiscité par les vrais amateurs de cinéma, ne sera pas Palme d’or mais Grand Prix du jury (que l’on peut assimiler à une seconde place). Heureux de ce prix qui laisse malgré tout un goût amer car il doit le partager, injustement, avec Claire Denis pour « Stars at noon ».
Là où les rumeurs nous donnaient espoir, ce n’était donc pas pour la Palme d’or mais bien pour l’ensemble des prix. Trois films belges en compétition et trois prix ! Du jamais vu dans l’histoire du cinéma. Alors, on continue à chanter « cocorico » avec le prix du jury, une fois de plus ex-aequo, pour « Les huit montagnes » de Charlotte Vandermeersch & Felix Van Groeningen et l’émouvant « EO » de Jerzy Skolimowski qui se lance dans le cinéma expérimental au message écologique très fort.
Cela dit, nous ne voudrions pas être rabat-joie mais un prix n’est pas toujours le reflet de qualité, c’est parfois une compensation amicale. Quoi qu’il en soit, ce prix spécial, appelé Prix du 75è anniversaire, a été attribué aux frères Dardenne pour « Tori et Lokita ». Cela tombe bien, c’est le seul prix que les frères n’ont jamais obtenu. Et, si ce film ne fait pas l’unanimité, on peut malgré tout être fier de notre cinéma, où trois générations y était représentées, qui s’est imposé dans le Festival le plus prestigieux du monde.
Seconde Palme d’or après « The Square »
Avant de révéler le lauréat de la Palme d’or 2022, le jury a décidé d’attribuer le prix d’interprétation féminine à Zar Amir Ebrahimi pour « Holy Spider » de Ali Abbassi et le prix d’interprétation masculine à l’acteur coréen Song Kang Ho dans « Broker » signé Kore-Eda Hirokazu, lui-même Palme d’or en 2018 avec « Un air de famille ». Si le prix est mérité, il a malgré tout surpris la presse internationale tout comme le prix de la mise en scène pour le réalisateur coréen Park Chan-Wook pour « Decision to Leave » racontant une histoire de meurtre. Saluons également le prix du scénario attribué à Tarik Saleh pour « Boy From Heaven » qui se trouvait sur certaines lèvres ce matin à l’heure des pronostics pour la Palme d’or. La Palme d’or, sujet de conversation la plus importante durant ces 11 jours de compétition et si souvent controversée une fois révélée. En 2017, elle avait été quelque peu huée. Cinq ans plus tard, les festivaliers et la presse ont peut-être mûris ? En tout cas, suffisamment que pour acclamer Ruben Östlund pour son film « Triangle of Sadness » dont c’est la seconde Palme d’or après « The Square » en 2017. Mais cette fois, il aura la lourde tâche d’attirer du monde dans les salles car tels étaient les propos de Vincent Lindon, Président du jury, lors de la conférence de presse du jury. Très honnêtement, le film devrait rencontrer le succès en salles car il est à la fois profond et très rigolo. A un tel point que jamais personne n’a osé pronostiquer ouvertement le film « Palme d’or » car on connaît le jury cannois plutôt réservé et politiquement correct. Cette année, il a osé tout comme il l’avait fait l’année dernière avec « Titane » ou encore en 1994 avec « Pulp fiction ». Eh oui, même à 75 ans, le Festival de Cannes peut encore nous surprendre. Et tant mieux !
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