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Mai 3, 2024 | Documentaires Criminels, Portraits criminels par Swen, Rubriques

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Lethal Lovers, une liaison destructrice : quand le meurtre devient pacte d’amour (Gwen Graham et Cathy Wood)

DES MEURTRES QUI PASSENT INAPERÇUS

Au milieu de la nuit ce 18 janvier 1987 s’endorment les pensionnaires de l’Alpine Manor, une maison de retraite du Michigan. Deux aides-soignantes, amantes depuis quelques mois, se faufilent discrètement dans la chambre 614. Y séjourne Marguerite Chambers, une patiente âgée de 60 ans. Gwen Graham et Cathy Wood, qui bénéficient de rapports exemplaires de la part de leurs supérieurs, s’approchent silencieusement du lit.  Là, elles se jettent sur la vieille dame puis l’étouffent en lui serrant le nez et en lui bloquant la bouche à l’aide d’un gant de toilette.  Le corps de Marguerite sera découvert quelques heures plus tard, gisant sur son lit, dans le silence de cette froide nuit hivernale. Le décès de la femme qui avait reçu un diagnostic d’Alzheimer quelques années auparavant et avait perdu la capacité de communiquer, sera classé comme mort naturelle et aucune autopsie ne sera jugée pertinente.

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Le mois suivant, pas moins de trois résidentes perdront la vie dans ces mêmes conditions. C’est Myrtle Luce, 95 ans, occupant la chambre 206, que l’on retrouve inerte dans la nuit du 9 au 10 février. Quelques jours plus tard au petit matin, on tombe sur Mae Mason, 79 ans, couverte de ses propres excréments. Le lendemain, le 16 février, la patiente décédée dans son lit a le visage gris, les yeux fermés et la mâchoire affaissée sur le côté. Belle Burkhard, 74 ans, connaît le même sort dans la chambre 112, le 25 février. Enfin, c’est Edith Cook, âgée de 97 ans, qui marquera le terme de cette frénésie meurtrière, le 6 avril suivant, après une période d’accalmie d’environ un mois et demi. Beaucoup de pensionnaires finissant leur vie à Alpine Manor, aucun de ces décès n’alertera le personnel soignant, ils seront tous classés comme arrêts cardiaques.

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Cette même année, Gwen Graham entame une relation amoureuse extraconjugale avec Heather Baragar, une autre aide-soignante de l’institution. La jeune femme finit par quitter Cathy ainsi que le logement qu’elles partageaient. Cette dernière n’accepte pas la tromperie et va jusqu’à menacer  Gwen avec une arme à feu. Suite à l’évènement, Graham et Baragar décident de quitter l’état et s’installent au Texas pour y refaire leur vie loin de Wood. Gwen Graham trouve alors un nouveau travail au Christus Trinity Mother Frances Hospital.

INVESTIGATION

Tout change quand ce 6 octobre 1988, l’ex-mari de Cathy, Ken Wood se rend à la police pour faire une déposition auprès de l’inspecteur Freeman malgré les supplications de son ex-femme. Ce qui est dans un premier temps perçu par le service de police de Walker comme une tentative de vengeance suite à un mariage raté donne rapidement lieu à l’ouverture d’une enquête. Les forces de l’ordre interrogent Cathy qui finit par avouer les meurtres et fournir des récits détaillés de chacun des crimes par peur, dit-elle, que Gwen ne récidive avec les nouveaux-nés dont elle s’occupe dans le cadre de ses nouvelles fonctions à l’hôpital.

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Dans sa version des faits, elle incrimine son ex-collègue et compagne en s’attribuant l’unique responsabilité d’avoir eu le rôle de guetteur à l’entrée des chambres. Elle accuse Gwen d’avoir conservé des trophées des meurtres mais rien ne sera retrouvé. Les agents se penchent sur le casier de Graham mais il ne contient qu’une poursuite pour avoir signé des chèques sans provision, trois ans auparavant.

On décide de s’intéresser aux décès déclarés à Alpine Manor, cinq d’entre eux retiennent alors l’ attention de la police. L’exhumation de deux victimes présumées est ordonnée. C’est donc le 30 novembre 1988, près d’un an après son enterrement, que la dépouille de Marguerite Chambers est déterrée et emmenée à la morgue de Kent pour examen. Le médecin légiste en charge des analyses est alors incapable de déterminer avec certitude la cause de la mort mais on change le statut de mort naturelle en homicide en raison de la complétude du témoignage de Cathy Wood et de la correspondance entre les décès et la période d’activité professionnelle des deux femmes.

Les policiers réinterrogeront longuement Wood pour tenter de déterminer son degré d’implication dans les crimes. Elle passe alors une premier test polygraphique afin de juger la véracité de sa version mais elle échoue. Elle réussit en revanche le second, quand elle reconnaît être davantage impliquée.  En décembre 1988 on arrêtera officiellement les deux ex-concubines que la presse surnomme déjà « The Lethal Lovers ». Son témoignage à l’encontre de Gwen Graham lui vaut un accord de réduction de peine.

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PASSÉ DES ACCUSÉES ET RENCONTRE DÉCISIVE

Cathy Wood, de son vrai nom Catherine May Wood, naît le 7 mars 1962 dans l’état de Washington. Elle grandit dans le Massachusetts mais n’a pas une enfance heureuse, évoluant aux côté d’un père alcoolique, vétéran de la guerre du Vietnam, violent et absent. A l’école, elle est souvent moquée pour son physique. Sa première expérience charnelle est avec un jeune homme transgenre qui se fait appeler David. Elle est encore mineure quand elle rencontre Ken Wood et tombe enceinte, ce qui motive le jeune couple à se marier. En février 1980, elle donne naissance à son unique enfant prénommée Jacqueline. Elle a alors 17 ans.

La famille déménage au Michigan mais Cathy semble malheureuse dans cette vie qui ne lui correspond pas. Elle déclare au sujet des relations intimes qu’elle entretenait avec son mari : « Le sexe n’était rien, juste quelque chose que vous avez à faire, quelque chose que vous faites parce que votre mari le veut […] je n’aimais pas qu’il me touche ». Après un mariage qui aura duré 7 ans, le couple divorce en 1986 et Ken obtient la garde exclusive de leur fille sans que Cathy ne s’y oppose.

En juillet 1985, elle est embauchée à Alpine Manor, en tant qu’aide-soignante et sera rapidement promue superviseur. En parallèle de sa vie professionnelle, elle commence à fréquenter le monde de la nuit, notamment des bars gays. A cette époque elle entame une relation amoureuse avec une collègue de l’institution prénommée Dawn. Elle dira plus tard que ce sera la première fois dans son parcours sentimental qu’elle s’est sentie comprise et satisfaite sur le plan sexuel et émotionnel. C’est Dawn qui présentera Cathy à Gwen Graham.

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Gwen de son vrai nom Gwendolyn Gail Graham voit le monde le 6 août 1963 en Californie. Elle grandit avec son frère et ses parents dans une ferme au Texas et est décrite comme une enfant calme, respectueuse mais triste. Son père est un homme tyrannique qui l’oblige à assister à l’abattage du chien de la famille. Profondément marquée par cet évènement, elle gardera les dents de son animal, qu’elle a récupérées dans sa tombe, jusqu’à son arrestation. Elle connaît une enfance négligée et est abusée sexuellement par son père. Ce dernier ne sera jamais condamné. Durant son adolescence, Gwen adopte des comportements auto-agressifs, se scarifie et s’inflige de nombreuses brûlures de cigarette sur les bras.

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C’est dans la salle de repos du personnel d’Alpine Manor que les deux femmes feront connaissance. Cathy remarque tout de suite la trentaine de cicatrices sur les avant-bras de Gwen dont les manches étaient retroussées. Les deux collègues se rapprochent rapidement, avant d’entamer une relation amoureuse en mars 1986.

DYNAMIQUE RELATIONNELLE ET ANALYSE PSYCHOLOGIQUE

Selon leurs propres aveux, les deux femmes avaient initialement pour objectif de choisir leurs victimes en fonction de l’initiale de leur prénom dans le but de former, à terme, le mot « M-U-R-D-E-R ». Un jeu macabre se met donc en place. Plusieurs tentatives de meurtres échouent mais personne ne croit les survivants, étant tous âgés et atteints de démence ou d’hallucinations. Les compères sont rapidement confrontées à la ténacité de certains pensionnaires et finissent par abandonner leur plan initial, décidant de s’en prendre à un profil de victime bien précis, toujours avec le même mode opératoire : que des femmes âgées, choisies pour leur impuissance, leur incapacité à se défendre, tuées par asphyxie.

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Les deux complices confieront plus tard avoir développé dans leur relation intime certaines pratiques sexuelles issues du milieu sadomasochiste, notamment l’asphyxie érotique. Gwen Graham et Cathy Wood semblent avoir agi dans le cadre d’un genre de « jeu sexuel », le meurtre occupant une place de stimulant. On sait, en effet, qu’après leurs passages à l’acte elles auraient eu des rapports sexuels au sein même de la structure. Le mobile le plus probant dans cette affaire semble donc être le plaisir procuré par le sentiment de contrôle et l’attrait sexuel que les meurtres revêtaient pour les deux femmes. Selon leurs déclarations, les passages à l’acte leur auraient procuré une forme de « plaisir » et de « libération émotionnelle », en plus de les « lier pour toujours ».

Les meurtres représentaient pour le couple une forme d’assurance sécurisante de la présence de l’autre, un pacte qui les maintenait ensemble, dépendantes dans la durée et empêcherait l’autre de partir. Dans cette idée elles se répétaient : « Tu seras mienne, pour toujours et cinq jours ». Une phrase aux échos d’aveux, le nombre de « jours » évoluant au gré du nombre de victimes. Leur relation passionnée prend cependant fin en juillet 1987 et avec elle un parcours criminel de quatre mois.

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Leur dynamique relationnelle et leur responsabilité respective ne font pas consensus. Cathy Wood dit qu’elle était terrorisée et décrit Gwen Graham comme étant émotionnellement et sexuellement dominante dans la relation. Elle rapporte que Graham voulait la contraindre à tenir un rôle plus actif dans un des meurtres pour lui prouver son amour mais qu’elle n’était pas prête pour cela et que c’est ce qui aurait détérioré leur relation.

Gwen Graham a formellement démenti cette version, soutenant que son ex-compagne agissait par colère suite à son infidélité. Elle a affirmé qu’elle ne supportait plus la dimension abusive et dominante de Wood.

Roger Kaliniak, détective ayant travaillé sur l’affaire a pris position en affirmant que Cathy était plus impliquée qu’elle ne le laissait entendre : “Je crois que Wood était le cerveau, c’est elle qui tirait les ficelles (…) Graham s’est occupée du sale boulot et Cathy Wood était le cerveau”.

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Lowell Cauffiel, journaliste d’investigation et auteur de Forever and Five Days défend la version de Gwen Graham et réfute les accusations de Cathy Wood selon lesquelles elle n’aurait été que le pion de son amante. Wood aurait, en réalité, planifié les meurtres après avoir eu des suspicions de tromperies concernant Graham et l’aurait donc impliquée pour l’empêcher de partir avec une autre mais, voyant qu’elle la perdait quand même, aurait décidé de la piéger et de se venger de l’avoir laissée pour quelqu’un d’autre.

Gwen fait état d’une tendance à l’agressivité mais des tests ont démontré qu’elle était facilement manipulable et qu’elle n’avait pas les capacités intellectuelles de planification nécessaires à la mise en œuvre de leurs crimes notamment quand on prend en compte le « jeu » des initiales mis en place au commencement de leur parcours criminel. Il a aussi été mis en avant que Gwen Graham souffrait d’un trouble de la personnalité borderline.

Cathy Wood est, quant à elle, dépeinte comme menteuse et jalouse pathologique, avec de grandes capacités d’adaptation sociale. L’expert qualifiera Cathy de manipulatrice sophistiquée en opposition à Gwen Graham qui est plus impulsive et dotée d’un niveau d’élaboration mineur. Selon le Docteur Michael Abramsky, on peut parler de tendances psychopathiques pour les deux femmes.

Enfin, le docteur John Palmatier affirme que Cathy Wood est atteinte d’un trouble de la personnalité narcissique.

Crédit : Photo d’identité judiciaire du département du shérif du comté de Kent

PROCÈS ET CONDAMNATION

Dans cette affaire particulière par son absence de preuve médico-légale, les enquêteurs et les magistrats ont statué sur la véracité des faits, en raison des innombrables témoignages recueillis de leurs ex-collègues et proches. Les deux accusées ont également reconnu à plusieurs reprises avoir tué une demi-douzaine de patients, en dépit de différences concernant la responsabilité respective des deux femmes.

Le procès débute le 11 septembre 1989. Après un délibéré de sept heures, Gwen Graham est reconnue coupable et écope de cinq condamnations à perpétuité. Graham sera incarcérée à la prison pour femmes de la Huron Valley située à Pittsfield Township dans le Michigan.

Cathy Wood est, quant à elle, condamnée à une peine de 40 ans de prison et est incarcérée à l’établissement pénitentiaire correctionnel fédéral pour femmes de Tallahassee en Floride. Gwen Graham déclare  au sujet de son ex-compagne : « Je ne pense pas qu’elle s’y attendait du tout. Je pense qu’elle s’attendait à me faire enfermer et qu’elle reparte libre et rentre chez elle. Je ne pense pas qu’elle s’attendait à faire ne serait-ce qu’un jour », «Elle a pris ma vie, elle a pris ma vie entière pour quelque chose qui n’est jamais vraiment arrivé », « elle a gagné et au final elle gagnera si je meurs ici (en détention) ».

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REMISE EN LIBERTÉ

Graham confie au sujet de la peine de son ex-compagne : « Je vous le dis, c’est une personne diabolique. C’est une personne malfaisante et peu importe ce qu’ils ont besoin de faire pour la garder là-bas (en détention), qu’ils le fassent ».

Détenue modèle, Wood est remise en liberté le 16 janvier 2020 et vit aujourd’hui dans la ville de Fort Mill, en Caroline du sud, avec sa sœur.

Des familles de victimes ont poursuivi en justice les propriétaires d’Alpine Manor. L’institution est toujours une maison de retraite mais se nomme maintenant Sanctuary at Saint Mary’s.

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Pour l’anecdote Cathy Wood et Gwen Graham ont inspiré les sœurs Miranda et Bridget Jane, deux infirmières tueuses dans la saison 6 de la série American Horror Story, Roanoke.

On se retrouve dans « Portraits Criminels par Swen » tous les premiers vendredis du mois pour une nouvelle affaire. En attendant, vous pouvez accéder à différents dossiers criminels, sous la forme de vidéos documentaires, sur la chaîne Youtube : Swen True Crime.

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