MALDOROR EN AVANT-PREMIERE A VIRTON
C’est dans le cadre du Festival du Film européen de Virton que le réalisateur belge Fabrice du Welz est venu présenter « Maldoror ». Une œuvre inspirée de l’affaire Dutroux. Sortie du film prévue en janvier. Alain Stévenart.
Le film commence très fort. Avant même le générique, deux gendarmes ramènent un adolescent chez ses parents. Un déferlement de violence va se passer dans la famille et l’un des deux flics va tenter d’intervenir alors que son collègue lui dit de laisser tomber. Le décor de « Maldoror » est planté : la banlieue de Charleroi, la violence, la gendarmerie et le héros, Paul Chartier. L’action du film est datée, précisément : 1995. Deux fillettes ont été enlevées, elles s’appellent Cécile et Elina. Elina est une petite fille d’origine italienne. La communauté italienne est très présente à Charleroi, Paul Chartier le tout jeune gendarme s’apprête à épouser Gina qui en fait partie.
Le décor du film est planté en dix minutes et le film dure deux heures trente-cinq. Il va y avoir deux spectateurs différents : celui ou celle qui se souvient de l’affaire Dutroux et celui ou celle qui est trop jeune que pour l’avoir vécue.
Si l’on oublie l’affaire Dutroux, cela n’est possible que pour les spectateurs nés après l’affaire qui a secoué la Belgique, il reste un solide thriller. Fabrice du Welz, le réalisateur donne à son film un rythme d’enfer, l’action est permanente, on est loin de la caricature d’un cinéma belge gentil, social et propre sur lui. Comme on l’a déjà vu dans le cinéma américain, « Maldoror » révèle l’idéalisme d’un jeune flic pas encore blasé face à un groupe de collègues qui préfèrent le confort à la justice. Comme on l’a déjà vu dans le cinéma américain, notamment chez Scorcese, Fabrice du Welz inscrit son film au cœur de la communauté italienne de Charleroi, une communauté vivante, joyeuse et solidaire. Qu’on ne se méprenne pas ! Maldoror est un film complètement belge et aussi un film original et personnel. Fabrice du Welz n’a pas fait du cinéma américain à Charleroi. Il donne à voir au spectateur qu’il n’est pas nécessaire d’être à New-York pour faire un thriller de qualité, une pure réussite.
Et puis, il y a l’autre spectateur, celui qui se souvient du calvaire de Julie et Melissa, de l’assassinat d’Ann et Eefje, de la marche blanche, de Marc Dutroux et de l’incroyable cafouillage policier et judiciaire qui a contribué à transformé un enlèvement en drame national. On retrouve toute une galerie de personnages de sinistre mémoire : Marc Dutroux devient Marcel Dedieu, Michel Nihoul devient Jacky Dolman, Michel Lelièvre est Didier Renar, sans oublier la juge Doutrèwe ici renommée Remacle. Nous savons aujourd’hui comment l’affaire s’est terminée : Dutroux et ses comparses ont été condamnés, Michel Nihoul a été acquitté. Et une question reste aujourd’hui en suspens : Marc Dutroux était-il un électron libre ou l’homme de main d’un réseau ? Le film prend clairement le parti des tenants du réseau, des nombreux belges qui pensent qu’on leur a caché tout ou partie de la réalité.
Au crédit du film on ajoutera la qualité de l’interprétation : Antony Bajon est parfait dans le rôle de Paul Chartier, Alba Gaïa Bellugi est Gina. Le reste de l’affiche est à l’avenant : Jacky Berroyer (Jacky Dolman) et Sergi Lopez (Marcel Dedieu) sont simplement inoubliables. Mélanie Doutey, Béatrice Dalle et Laurent Lucas complètent un casting top niveau.
« Maldoror » sera sur tous les écrans belges en janvier. Son succès, largement mérité, pourrait bien réveiller quelques consciences endormies.
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