Festival de Cannes 2021

Par Thibaut Demeyer, depuis la Croisette

L’actrice française Marion Cotillard, auréolée d’un Oscar de la meilleure actrice, le César dans la même catégorie, le Bafta et le Golden Globe pour sa prestation dans « La Môme », possède le record de participations en sélection officielle à Cannes avec six films en seulement cinq années.

Toujours aussi disponible et souriante, la compagne de Guillaume Canet est venue défendre son dernier film « Annette » de Léos Carax, présenté en ouverture. L’occasion de lui poser quelques questions.

Marion, dans « Annette », qui est une comédie musicale, vous interprétez une cantatrice. Comment vous êtes-vous préparée pour ce rôle où vous chantez, contrairement au film d’Olivier Dahan « La Môme » ?

Marion Cotillard : je me suis préparée avant le tournage autant que je pouvais. La spécificité de ce film est qu’il s’agit, comme vous l’avez dit, d’une comédie musicale. Les chansons sont filmées en direct et bien entendu, nous avons été formés à ces chansons. La difficulté est lorsque l’on chante, et en général dans une comédie musicale, on enregistre en studio ce que l’on interprète et en suite, on fait du play-back. Mais dans « Annette », cela n’a pas été le cas, c’était du direct. Cela signifie que cela change le chant à chaque mouvement du corps et comme nous avons beaucoup d’action tout en chantant, la préparation pour ce rôle a été très différente par rapport à d’autres projets de comédies musicales. Donc, je me suis formée au chant tout en bougeant beaucoup, ou en étant allongée, en marchant, en faisant différents mouvements. Ceci signifie que l’on peut explorer les petits incidents qui surviennent comme lorsque l’on ne parvient plus à respirer comme il faut ou à chanter comme il faut. C’est tout cela qui rend la chose intéressante.

Le film parle, entre autres, de la célébrité, de l’absence de célébrité, de pouvoir. Pensez-vous dès lors que l’on peut être écrasé par un échec artistique ?

Marion Cotillard : pour moi, c’est plus un besoin de reconnaissance que de célébrité. Je parle pour ces personnages mais en définitive, nous avons tous besoin d’être reconnus par nos parents, notre famille, nos amis pour trouver notre place. J’ai trouvé cet aspect du film très intéressant pour façonner le personnage. J’ai déjà été très largement reconnue mais j’ai encore ce besoin de reconnaissance. C ’est une grande question dans ma vie personnelle, pourquoi avons-nous besoin d’être vu, entendu, aimer par autant de gens que l’on ne connait même pas et comment tout cela peut façonner votre confiance en vous-même et comment cela peut aussi vous détruire, surtout si vous n’avez pas suffisamment d’estime de soi. Vous avez le miroir d’autant de personnes qui vous aiment, c’est quelque chose qui vous place dans une situation où quelque chose ne colle pas. Il n’y a plus de logique. Ensuite cela vous détruira d’autant plus. On a vu de nombreuses personnes célèbres connaitre une chute vertigineuse parce qu’il y a quelque chose qui ne marche plus en eux.

Quel est votre rapport avec l’opéra ?

Marion Cotillard : je n’étais pas très familière avec l’opéra. Quand j’avais une quinzaine d’années, j’écoutais beaucoup Carmen parce que j’avais vu le film et j’adorais la musique. J’ai vu mon premier opéra quand je préparais « Annette ». Cela a été un vrai choc d’être transpercée d’émotion par une voix, par quelque chose que je ne saurais pas expliquer sachant que les chanteurs d’opéra ont un rapport très particulier à l’émotion parce que celle-ci va transformer leur voix. Tout est canalisé dans cette voix et pas autre part. Un chanteur d’opéra ne peut pas chanter en pleurant. J’ai donc découvert un peu plus l’opéra quand je préparais « Annette ».