la 45ème édition du Festival International des Arts de la Rue de Chassepierre : photos Reportage
Photos de Veronique Mergaux
Ces 18 et 19 août 2018, la 45ème édition du Festival International des Arts de la Rue de Chassepierre vous conviera à parcourir ses sentiers de folies, à vous inventer d’inédites libertés, bref, à partir en libres délires, en vous inspirant des univers et des talents multiples des artistes invités.
Existe-t-il une liberté plus fantastique que celle de s’évader des routines de la quotidienneté ? Et de désirer partager ses délires créatifs, ou de refléter ceux de sa collectivité ? Est-il absurde de proposer des approches comiques, ludiques, poétiques, des dingueries sans nombre de nos sociétés ? Comme réponse, le non s’impose, donc les délires, libres et artistiques, sont les signes de la plus éclatante des santés. Et cette santé, tant au mental qu’au physique, il vous sera possible d’y accéder. Cet été, il vous suffira de divaguer par les rues et les prairies, avant de pénétrer dans les spectacles de chaque compagnie.
Cette fois encore, plus de cinquante d’entre elles viendront, de France et d’Espagne, des Pays-Bas, de Belgique, de Suisse ou d’Allemagne, délirer à loisir et vous offrir un petit air de liberté.
Leur autorisation de sortie, les heureux déjantés de Joe Sature et ses Joyeux Osselets (FR) la célèbreront en fantaisie et en musique, complètement déchaînés. Sans autorisation de sortie, Typhus Bronx (FR), un papillon dans la tête, se déplacera avec toute sa chambre, voire avec tout le pavillon, puisque, comme lui, vous deviendrez un tantinet cinglés. Cinglée, Rosie Volt, clown fantasque et de fUtilité publique (FR), l’est aussi, vu qu’elle mélange des musiques world-lyrico-folk-rock avec des airs de cantatrice. Le trio des Têtes d’Affiche (FR), expert en accidentologie, ratologie et autres foirades, se dévoilera tour à tour dans un spectacle déjanté.
Le vide, Chloé Moglia (FR) le poétise et l’utilise pour sa chorégraphie, légère et puissante, rendant ainsi la terre moins pesante. Avant de s’envoyer en l’air, les trapézistes de La Burrasca (FR) devront d’abord dompter leur portique de fer qui, de prime abord, peut leur sembler contraire. La femme et l’homme de L’Eolienne (FR) et Joli Vyann (GB) feront une danse de leurs contraires, en se lançant, en se soutenant et en toute sensibilité, tandis que du rock libre de Patti Smith jaillira la furieuse tendresse du Cirque Exalté (FR).
Pour Joan Catala (ESP), la force libre vient d’un mat brut et du public. Vous n’aurez donc qu’un pas à faire, ensemble, vers lui, si vous voulez être complices de ses transports physiques. Le public, Claire Ducreux (ESP) l’invitera, à l’ombre de son arbre, dans une danse bénéfique. Sa lenteur et ses silences vous apaiseront, dans ce monde qui a les nerfs à fleur de tempo. Cependant, dûment reliés, les mots ont bien des proses à dire lorsqu’ils se font livres, et que ces livres sont des piles sur lesquelles s’équilibrera le Groupe Fluo (FR). Le soir, entre notes et paroles, la compagnie Luc Amoros (FR) enluminera d’éphémère la surface illuminée de sa toile, dans un libre délire qui vous fascinera, par ses couleurs, et vous fera peut-être réfléchir, en prenant un peu de hauteur.
Les mots de Rimbaud et de son Bateau Ivre se liront sans un mot sur un long fil de grâce, en abordant aux rivages aériens de la Cie Hors Surface (FR). Les azimutés de la Cie Azimuts (FR) puiseront leurs phrases dans Molière ou Corneille, tandis qu’ils pétriront une quiche lorraine, réalisant ainsi l’union parfaite entre la littérature et les objets du quotidien. Objets qui mèneront la Cendrillon de Scopitone et Cie (FR) à réaliser son rêve, si proche et si lointain, celui de devenir une ménagère magique de moins de cinquante ans.
Loin de tout domicile, des compagnies déambuleront. Les oiseaux rares de Quartier de Nuit (FR) emplumeront les rues de leur poésie. Les danseuses de Sauf le dimanche (FR) improviseront leur chorégraphie à partir d’un geste, simple ou compliqué, que vous leur prêterez. Imprévisible et improvisé, le trio de La Fausse Compagnie (FR) le sera, dès lors qu’il vous embarquera dans la belle ivresse de ses cordes bien timbrées. Les fêlés du Collectif La Pigeonnière (BE) sortiront leur appareil photo afin d’immortaliser votre sourire, peut-être celui qu’aura peint sur votre visage le clown Brizzi (FR), et ses multiples facéties.
Mais il faudra aussi vous garer des divers véhicules qui emprunteront librement la chaussée. Le vélovabo de la Cie Les Veilleurs (FR) vous lavera les mains et l’esprit. Peut-être prendrez-vous place à douze à bord du plus mini-minibus du monde, celui de la Cie Delinus (NL). Musique et mécanique se marieront dans les vieilles autos-immobiles de la Rue de la Casse (FR), qui échapperont ainsi à la casse.
La musique, c’est le délire des mélodies, la liberté des instruments, la folle comédie des notes qui bondissent. Ulik Robotik (DE) alliera l’homme et la machine dans une suite de sons percutants. Le labo rythmique de la Cie POC (FR) jonglera avec ses corps et des objets pour vous composer un concert déconcertant. Ses partitions, la Cie 100 Issues (FR) les imaginera acrobatiques et charnellement frappantes, tandis que la Cie Sur Mesure (BE) s’accompagnera de sauts, de jongleries et d’un trampoline pour battre sa mesure.
La musique, ce seront aussi des groupes, comme Zykatok and The Carriole (FR), qui vous jouera des airs jazzy à bord de sa drôle de carriole. Le jazz se déclinera sur plusieurs airs libres, ceux, enracinés à la Nouvelle Orléans, du joyeux duo de Sousa Schleb (BE), et celui, empreint de folk, de Fracaban (BE). En écoutant les tempos ensoleillés de Kabochar (BE) et de L’ChaiM (NL), vous louerez un balcon avec vue sur les Balkans. Ou vous plongerez dans la bonne humeur du vaste répertoire de Top Fanfare (FR), dans les musiques éclectiques des gaumais de Busy Bee (BE), et la fête sera complète si vous êtes pris de danse au ventre, grâce aux sons endiablés de Mononk’s Band (BE).
Pour les plus jeunes, ou ceux qui n’ont jamais eu l’âge de vieillir, les animaux de Katakrak (ESP) seront là pour vous divertir, et deux manèges pour vous emporter vers la liberté, celui, maritime et farfelu, de De Machienerie (BE) et celui, apaisant d’apesanteur, de La Volière aux Pianos (FR). Sur la plaine de jeux du village, l’artiste plasticien Stephane Kozik (BE) proposera une installation numérique inédite. Et de jeu, il en sera aussi question avec le Collectif Merci LaRattrape (FR), vu que deux amis se livreront à une partie de jongleries dont ils seront seuls à connaître les règles libres. Et si vous voulez faire rimer rôles et drôles, Les Batteurs de Pavés (CH) proposeront à vos enfants de s’ébattre pour leurs droits, dans un remake, qui déménagera, du Germinal de Zola.
Le déménagement du Tof Théâtre (BE) n’hésitera pas à être international, et sera réalisé, à bord d’un long camion, par des marionnettes pas banales. Bob, le livreur de L’Arbre à Vache (FR), n’aura que deux cartons en mains, plus une porte close pour lui faire obstacle, et un bon prétexte à spectacle. De la porte aux fenêtres, Les Voisins (BE) vous inviteront à épier poétiquement des voisins imaginés, à travers un jeu indiscret d’ombres et de lumières. Les visages proches et ternis, Carnage Productions (FR) et le tendre Arti les embelliront, en recherchant la femme de leur vie. Peut-être serez-vous l’élue de leurs couleurs ? La recherche, Sherlock Holmes n’y est pas étranger, même s’il sera revu et corrigé par la Cie des Ô (FR) et l’énergie positive que vous lui donnerez. Et si vous êtes fascinés par la quête du plus petit théâtre de l’univers, vous le trouverez chez Histoire d’eux (FR), ainsi que des histoires bien mystérieuses.
Si les grands voyages sont votre liberté, vous embarquerez joyeusement dans celui des Arts Nomades (BE), dont les trois héroïnes mythiques vous guideront dans l’exploration de votre condition. L’expédition de la compagnie Les Vrais Majors (BE) sera temporelle, et vous plongera dans une vieille pellicule des années 30. De ces mêmes années, vous dégusterez les mille et un plaisirs de la kermesse du Théâtre du N-ombr’île (FR), qui recréera la Foire du Midi. Aujourd’hui, mais arrivée de très loin en famille, la Cie Les Goulus (FR) vous fera partager ses têtes bizarres, et des comportements venus de l’Est de ses délires.
Comme chaque année, le Festival aura le plaisir fou de coproduire deux de ses spectacles, Cirque Barbette (BE), des oiseaux tout à fait perchés, sur leur fil, et Les Souffleurs commandos poétiques (FR), des êtres hybrides animés de curiosité et qui ranimeront la vôtre. Lesquels Souffleurs s’insèrent aussi dans le plus large cadre d’un projet européen, « The Green Carpet », auquel Chassepierre collabore activement, en compagnie d’Activate Performing Art (GB), du Pôle National Cirque et Arts de la Rue d’Amiens, du Pôle National des Arts de la Rue « Le Citron Jaune » et du Domaine de Chamarande (FR).
De plus, bien avant l’été, le village accueillera en résidence artistique les Chemins de Terre (BE) et Victor B (BE), qui proposeront une avant-première de leur nouvelle création, respectivement le 2 mai et le 21 juin. Ces deux compagnies qui, depuis deux univers distincts – le premier poétique et minimaliste, le second drôle et féroce – interrogent nos comportements humains, seront à retrouver librement durant le Festival.
Enfin, pour débuter cette 45e édition, nous vous donnons rendez-vous à Chassepierre, le vendredi 17 août, au soir. Vous y suivrez les démêlés du jeune circassien Romain, présenté par l’école Cirq’en Bulles (BE), avant de vous laisser emporter par les rythmes des reprises de The Brack Brothers (BE). Quant aux galeries d’art, leur ouverture sera accompagnée par Afinado Sweet (FR), et la chaleur de ses mélodies.
Mais une fois le Festival clôturé, les arts de la rue n’en ont pas fini de vous envoyer délirer en liberté. Car, associés à d’autres acteurs de notre région, nous continuerons à vous proposer de nouvelles expériences culturelles. Ainsi, une Marche des Philosophes sera organisée, en partenariat avec l’asbl Tribal Souk, du 19 septembre au 3 octobre à travers la Gaume. Ni Cage ni Nid, le spectacle itinérant des Chemins de Terre (BE), sera présenté chaque soir dans un village différent. Avec le Centre d’Art contemporain du Luxembourg belge (CACLB), nous accueillerons en résidence, à l’automne, l’artiste numérique Stéphanie Laforce (BE), qui travaillera sur un projet à découvrir lors de l’édition 2019.
Si bien que le délire et la liberté ne sont pas prêts de perdre leur pertinence, ni leur intensité, lors de ce Festival toujours renouvelé. Et il vous sera facile de vous sentir libres, et de venir délirer avec nous. C’est déjà en vous, c’est à Chassepierre, et c’est en août.